LECTURE: mon avis sur "Putain"


J'ai découvert l'autrice Nelly Arcan lorsque je vivais au Québec (voir mon article à propos de ma vie d'expatriée à Montréal). C'est la première autrice Québécoise qu'il m'ait été donné de lire et ce fut une belle surprise. L'adaptation théâtrale de certains de ses textes repris dans la pièce "La fureur de ce que je pense" m'avait également plu. 



Nelly Arcan

Titre: Putain

Auteur: Nelly Arcan

Année de parution: 2001

Edition: Points

Note: 9/10




Le synopsis: Sur les conseils de son psychologue, Nelly, jeune escorte québécoise, décide à l'aube de ses 30 ans d'écrire ses chroniques de prostituée névrosée. Un récit haletant rédigé presque sans aucune ponctuation, d'un bloc, comme pour mieux ressentir le poids de chacun de ses mots et expériences humaines singulières. 



La critique en détail:

Préparez-vous à plonger au cÅ“ur des ténèbres, au plus profond des pensées d'une fille mal dans sa peau, mal dans son être. Préparez-vous aussi à vous perdre, entre Å“uvre et auteur. Est-ce vraiment vrai, tout ce qu'elle raconte ? Quelle est la part de fiction dans "Putain" ? 

On y parle anorexie, culte du corps, troubles de l'enfance, pression sociale, sexualité bien sûr, et surtout rapport homme/femme. On philosophe. On observe beaucoup, pour au final se questionner si peu puisque tout est déjà sous nos yeux. On y parle de ce métier si particulier qu'est la prostitution.

Premier livre d'une série de trois, "Putain" donne le ton sur ce qui sera le testament de Nelly, ses adieux, puisqu'elle nous y annonce qu'elle compte se suicider, chose qu'elle fera d'ailleurs dans la vraie vie 8 ans plus tard, quelques années en retard par rapport à ses prédictions. Mais ça, c'est à cause d'un homme, encore une fois. Pour comprendre, il faut lire la suite, dans son deuxième livre: "Folle", où Nelly raconte sa rencontre avec ce journaliste cocaïnomane, à l'époque où elle était moralement au plus bas. Et il est beau de voir que l'amour fleurit partout, même au creux d'une nuit sans lune le long d'un trottoir de la rue Ste Catherine...

Non, finalement: écrire ne sauve pas, pas toujours. Et certainement pas quand le lourd poids médiatique lié au succès de ce premier livre, vient s'ajouter à tous les autres poids que Nelly portait déjà difficilement. Evidemment, le fait de connaître la "suite" donne une dimension horriblement sombre à tout ce que nous raconte Nelly dans ce premier ouvrage. Elle, qui explique si bien cette peur de vieillir et cette lutte pour rester belle et jeune ad vitam aeternam... 

Quand je vois comment elle avait été humiliée par Ardisson... Je me dis que certes, ce n'était pas une "vraie" écrivaine, mais elle avait cette sensibilité, cette fureur de penser, cette manière si crue de vivre et de décrire les choses infâmes de notre société, qui font qu'on aimait la lire. Un bon écrivain n'est-il pas celui qui parvient à provoquer en nous une émotion, quelle qu'elle soit ? Pour moi, elle présente plus qu'un témoignage: c'est la vision humaine globale de notre siècle Occidental dans tout ce qu'il offre de pire. C'est glaçant, c'est Arcan. 


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